4. Pierre Leclercq : l’agriculteur (1921-1955)

Un no man’s land percé d’obus

A la fin de la guerre 14-18, Pierre Leclercq retourne à la vie civile et la vie agricole. A son retour à la ferme familiale, il ne retrouve que des ruines.

Tu n’as pas connu l’ancienne ferme Leclercq, à Rouvroy, puisqu’elle fut complètement réduite par les bombardements de 1914. Elle était très importante et fort bien bâtie et après la bataille de Waterloo un régiment de cavaliers Danois vint s’y installer. Il faisait partie de l’armée de Bernadotte. Celui-ci, bien qu’ancien français, était devenu suédois en épousant la fille du roi de ce pays (la Suède, la Norvège et le Danemark ne constituaient alors qu’une seule nation).
Un petit-fils de Michel Leclercq, qui était prénommé Jean-Baptiste, était né en 1802 et avait donc treize ans après la bataille de Waterloo (1815). Comme il n’y avait pas alors d’école à Rouvroy, les cavaliers danois le prenaient en croupe de leurs chevaux, et le conduisaient à l’école de Méricourt, ainsi que son frère Louis d’un an plus jeune que lui.

Henri Leclercq (cousin germain de Pierre), Arras, le 8 février 1966

De cette ferme familiale où son père Jean, chevalier du mérite agricole, obtint avant 1914 des prix de bonne tenue de ferme et de bonne culture, « il ne retrouve qu’un “no man’s” land en pleine zone rouge, percé de nombreux obus ne permettant qu’une vie de troglodyte ».1

Refusant aussitôt l’expropriation dont le principe avait été officiellement décidé, il se met résolument au travail pour reconstruire le domaine familial. En 1921, à la mort de son père, il en prend la direction et réussit à récupérer et à remettre en état de culture la totalité du domaine.

Il y fonde son foyer en épousant Marie-Antoinette de Bonnières (1899-1982) le 9 juin 1921, à Siracourt (Pas-de-Calais). Ils eurent 6 enfants (dont le premier mort en bas-âge, en 1922) : Jean-Pierre (1924), Cécile (1926), Annick (1928), Jacques (1930) et Odile (1940).

Huit générations de cultivateurs à Rouvroy

Les premières générations de paysans de la famille Leclercq date du XVIIIème siècle avec Michel (1735-1821). A cette époque, une auberge jouxtant une petite exploitation agricole appartient à la famille Capron, future belle-famille de Michel. Celui-ci s’y installe en 1761 avec Caroline Capron, sa femme. Son beau-père, Isidore Capron (1694-1760) est cultivateur à cette époque. Michel et Caroline héritent donc de ses terres, à Rouvroy.

Après Michel, les cultivateurs se succèdent de père en fils, sur les terres de Rouvroy : Jean-Baptiste (1773), Augustin (1806), Jean (1866), puis Pierre, qui fait l’objet de cette chronique.

Après Pierre Leclercq, cette tradition se poursuit avec ses fils Jacques (1930) et Jean-Pierre (1924), son petit-fils Dominique Leclercq (1949) et aujourd’hui son arrière petit-fils Pierre (le fils de Dominique).

C’est ainsi que les cultivateurs de la famille Leclercq vont se succéder sur 8 générations, de 1761 à 2024, et même 9 si l’on y inclue Isidore Capron qui a transmis par alliance ses terres à la famille Leclercq.

Une vie agricole “engagée” à Rouvroy

Pierre Leclercq ne cessera de mener lui-même son exploitation. Quelle vie intense pour mener cela de front, tout en reconstruisant à la fois sa ferme et sa commune ! Il anime à Rouvroy dès 1920 la coopérative de reconstruction.

Très rapidement, au milieu des années 1920, il devient aussi le plus jeune membre de la Commission betteravière du Nord et du Pas-de-Calais où il fait ses premières armes aux côtés du comte d’Hespel.

Dès 1934, il devient président de la Commission betteravière et déjà il siège au Conseil d’administration de la Compagnie Générale Betteravière (CGB). Ses interventions font toujours forte impression.

Très rapidement il apparaît comme un leader et « entre lui et le Président René Courtier » se crée une opposition complice et constructive pour le plus grand bien de la culture betteravière. Il s’oppose inlassablement aux expulsions de fermiers provoquées par la grande crise agricole du début des années 1930.

  1. Citation de M. Duflos, président du Syndicat Betteravier, aux obsèques de Pierre Leclercq le 17/01/55 ↩︎

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